Transfert du contrat de bail en cas de changement de propriétaire, même avant le début du bail (art. 261 CO)
Cette disposition est généralement incontestée dans la pratique, puisque les intérêts des parties concernées sont concordants : l'investisseur préfère acquérir un objet déjà loué et le locataire souhaite quant à lui continuer à utiliser les locaux loués, indépendamment de la personne du propriétaire et même après un transfert de propriété.
Jusqu'à présent, il existait une controverse en doctrine quant au fait de savoir si ce principe juridique s'applique également si le contrat de bail a été conclu mais qu'il n'a pas encore commencé et que le locataire n'a pas encore emménagé dans le bien loué. Cette question a maintenant été résolue par le Tribunal fédéral dans un récent arrêt du 20 février 2019, dans la cause 4A_393/2018, lequel confirme la décision du Tribunal de commerce de Zurich du 15 mai 2018, rendu sous la référence HG160080-O Altenburger Ltd legal + tax a agi en qualité de représentant de l'une des parties au litige). Notre Haute Cour a en effet considéré que, conformément au libellé de l'article 261 du Code des obligations, il n'est pas nécessaire qu'un bail ait effectivement débuté pour pouvoir être transféré à un nouveau propriétaire, la seule conclusion du contrat de bail étant suffisante.
C'est certainement une bonne nouvelle pour les locataires qui ont déjà résilié leur bail existant et qui comptent sur un nouveau logement, mais dont le nouveau bail n'a pas encore commencé au moment où la propriété du bien change de mains.
C'est également une bonne nouvelle pour les vendeurs, car ils auraient pu être tenus responsables des dommages subis par le locataire si le bail n'avait pas été valablement transféré et si le bien loué ne pouvait plus être mis à la disposition du locataire.
Pour les acquéreurs de biens immobiliers, cette décision implique évidemment qu'une due diligence approfondie soit effectuée avant l'acquisition, notamment en ce qui concerne les contrats de bail grevant l'objet à acquérir. De plus, l'acheteur avisé d'un immeuble à des fins d'investissement demandera une garantie sur l'indice des loyers et la validité des baux grevant l'immeuble. Enfin, l'acheteur qui a l'intention d'utiliser lui-même le bien immobilier devra requérir une assurance du vendeur quant à l'absence de tout contrat de bail. Si cette assurance s'avère inexacte, l'acheteur peut toujours faire valoir sa propre utilisation du bien et résilier le contrat de bail conclu avec le locataire pour le prochain terme légal (art. 261 al. 2 let. a CO). Dans ce cas, l'acheteur sera responsable des dommages causés au locataire, mais devra pouvoir répercuter sa responsabilité sur le vendeur compte tenu des assurances reçues de ce dernier.
Dans l'ensemble, cet arrêt du Tribunal fédéral est une bonne nouvelle et mérite d'être salué, dans la mesure où il met fin à une controverse doctrinale qui perdurait depuis de nombreuses années.